Région Normandie : sûreté nucléaire et radioprotection en 2024

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  • Communiqué de presse

23/06/2025

En 2024, le niveau de la sûreté nucléaire et de la radioprotection reste globalement satisfaisant

À l’occasion de la parution du rapport sur l’état de la sûreté nucléaire et de la radioprotection dans la région Normandie, la division de Caen de l’ASNR présente les conclusions des actions de contrôle qu’elle a menées tout au long de l’année 2024 en région Normandie.


Ce qu’il faut retenir pour la région Normandie

En 2024, l’ASNR a réalisé 213 inspections dans la région Normandie, dont 72 dans les centrales nucléaires de Flamanville, Paluel et Penly, et 17 sur le réacteur EPR de Flamanville.  64 inspections ont par ailleurs été menées sur des installations du « cycle du combustible », de recherche ou en démantèlement, 41 dans le nucléaire de proximité, 11 dans le domaine du transport de substances radioactives et huit concernant les organismes et laboratoires agréés par l’ASN.

L’ASNR a par ailleurs assuré 21 journées d’inspection du travail dans les centrales nucléaires dont l’EPR.

En 2024, 20 événements significatifs classés au niveau 1 de l’échelle internationale des événements nucléaires et radiologiques (échelle INES) ont été déclarés à l’ASNR en Normandie, dont 18 sur les INB et deux dans le nucléaire de proximité.


Le contrôle des centrales nucléaires de production d’électricité exploitées par EDF (Flamanville, Paluel, Penly, EPR de Flamanville)

Centrale nucléaire de Flamanville

L’ASNR estime que les performances de la centrale nucléaire de Flamanville rejoignent l’appréciation générale portée sur les centrales d’EDF

En matière de sûreté, la situation reste stable. Le redémarrage du réacteur 2 s’est globalement bien déroulé. Néanmoins, cette année encore, des événements significatifs ont été liés à un défaut de surveillance ou au non-respect du référentiel d’exploitation. L’ASNR souligne la nécessité d’améliorer la rigueur au sein du service chargé de la conduite des réacteurs. 

Les opérations de maintenance ont été maîtrisés malgré un incident sur un groupe électrogène lors de l’arrêt du réacteur 2. L’arrêt programmé en 2025 pour remplacement des générateurs de vapeur nécessitera une vigilance accrue sur la coordination des activités et la surveillance des sous-traitants.

Les performances en matière de radioprotection sont demeurées stables, notamment grâce à un bon fonctionnement du dispositif de déclaration des événements significatifs. Des progrès sont encore attendus en matière de port des équipements de dosimétrie et de maîtrise du risque de dispersion de la contamination.

Concernant la protection de l’environnement, l’ASN relève là aussi une situation stable, avec un exploitant maitrisant ses impacts et cherchant à les réduire. L’année 2025 doit être mise à profit pour améliorer la réactivité lors de la détection d’anomalies et rendre plus rigoureux le traitement des déchets produits en phase d’arrêt de réacteur.

Centrale nucléaire de Paluel

L’ASNR Caen estime que les performances de la centrale de Paluel en matière de sûreté nucléaire, de radioprotection et d’environnement rejoignent l’appréciation portée sur le parc nucléaire d’EDF.

En matière de sûreté, les résultats sont jugés satisfaisants. La rigueur d’exploitation progresse, notamment lors des phases transitoires, mais reste à renforcer pour la gestion des configurations de circuits et d’organes. L’incendie survenu en 2024 sur le transformateur du réacteur 3 a été bien maîtrisé par les équipes, bien que la qualité des documents d’exploitation, notamment en situation accidentelle, doive encore être améliorée.

Les programmes de maintenance ont été menés dans de bonnes conditions malgré une charge importante. Des efforts restent nécessaires pour le traitement des écarts, la surveillance des prestataires et le suivi des équipements sous pression.

En radioprotection, l’organisation du site est globalement satisfaisante, notamment pour les opérations à enjeu dosimétrique. Cependant, des lacunes persistent en matière de prévention de la contamination et de culture de radioprotection en phase d’arrêt.

Sur le plan environnemental, les exigences réglementaires sont globalement respectées. Toutefois, l’incendie du transformateur a révélé des insuffisances dans la gestion des eaux d’extinction, et la stratégie de traitement de ces effluents devra être précisée. Le transport interne des matières dangereuses reste aussi un point à améliorer.

Centrale nucléaire de Penly 

L’ASNR estime que les performances de la centrale nucléaire de Penly se distinguent favorablement en matière de sûreté nucléaire, tandis que celles en radioprotection et en environnement rejoignent l’appréciation générale portée sur les centrales d’EDF.

En sûreté, des progrès ont été constatés, notamment sur la rigueur d’exploitation, mais des fragilités subsistent. Plusieurs événements significatifs sont liés à des défauts dans la gestion de la configuration des installations, des problèmes de communication au sein du collectif de conduite et des lacunes dans la documentation. L’exploitant doit porter plus de vigilance sur la préparation des activités et la prise en compte des facteurs organisationnels et humains.

En maintenance, l’organisation est jugée robuste, mais des erreurs dues à des défauts dans les procédures ont été relevées. La superposition des deux arrêts de réacteurs en fin d’année a mis en évidence des faiblesses dans la traçabilité et le suivi de la conformité des installations.

En radioprotection, des avancées ont été notées dans l’organisation, notamment avec le déploiement des pôles de compétence. Toutefois, des faiblesses persistent sur la maîtrise du risque de contamination et la gestion des activités à enjeu radiologique élevé, comme les tirs radios et le balisage.

Du côté de l’environnement, le site bénéficie d’une organisation solide pour le suivi des rejets. Un exercice inopiné a démontré la réactivité des équipes. Les mesures mises en œuvre pour réduire les rejets de gaz appauvrissant la couche d’ozone semblent désormais consolidées.

EPR de Flamanville

L’année 2024 a été marquée par une étape clé : la délivrance de l’autorisation de mise en service du réacteur EPR de Flamanville par l’ASN, le 7 mai. Cette décision fait suite à un travail intense de contrôle de l’achèvement de l’installation, des essais de démarrage et de l’évaluation de la conformité des équipements sous pression nucléaires (ESPN). EDF a montré une forte mobilisation, avec un suivi quotidien de l’avancement et la réalisation d’essais complémentaires à la demande de l’ASN.

Depuis la mise en service, les inspections se sont concentrées sur les essais de démarrage, le suivi des aléas rencontrés et le traitement des événements significatifs. L’ASNR considère que les opérations de démarrage ont été correctement menées, malgré un nombre élevé d’événements déclarés, dont un tiers sont classés au niveau 1 de l’échelle INES. Ces événements, majoritairement liés à des erreurs humaines, traduisent la transition d’une culture de chantier à une culture d’exploitation. L’ASNR appelle à une rigueur renforcée sur les fondamentaux de conduite, en particulier sur la maîtrise de la réactivité et l’appropriation du fonctionnement des groupes électrogènes de secours.

En parallèle, des inspections thématiques ont été menées (confinement, gestion des déchets, rejets, ESPN). Si l’organisation est jugée globalement satisfaisante, des améliorations sont attendues dans le suivi des rejets et la gestion des déchets. 

Autres installations nucléaires

Centre de stockage de la Manche

L’ASNR a autorisé le 29 avril 2024 la poursuite du fonctionnement du centre, à l’issue du réexamen périodique engagé en 2019. Cette autorisation s’accompagne de nouvelles prescriptions, portant notamment sur la surveillance de la couverture actuelle, les études sur la couverture pérenne, la mémoire du site et la reprise éventuelle de colis contenant des radioéléments à vie longue.

L’organisation mise en œuvre par l’Andra est jugée globalement satisfaisante en matière de sûreté, de radioprotection, de surveillance environnementale et de respect des engagements. L’ASNR souligne toutefois la nécessité de renforcer l’analyse du risque de fraude, notamment vis-à-vis des prestataires extérieurs.

Grand accélérateur national d’ions lourds (GANIL)

En 2024, l’ASNR a poursuivi l’instruction du projet DESIR (Désintégration, Excitation et Stockage d’Ions Radioactifs), visant à créer de nouveaux espaces expérimentaux à partir des faisceaux SPIRAL1 et S3. Ce projet, impliquant une modification du périmètre de l’INB, a reçu un avis favorable de l’ASNR en décembre 2024.

Parallèlement, l’instruction du second réexamen de sûreté s’est poursuivie. L’ASNR a salué les progrès réalisés dans la définition des exigences de sûreté et leur intégration au référentiel d’exploitation, tout en appelant à une meilleure prise en compte des facteurs organisationnels et humains dans les modifications de l’installation.

Dans le cadre d’une campagne nationale contre la fraude, l’ASNR a relevé des initiatives positives mises en place par l’exploitant, bien qu'encore non centralisées dans un processus structuré. De plus, une réorganisation de l’exploitant est prévue en 2025, dont l’ASNR suivra attentivement la mise en œuvre pour garantir le maintien des exigences de sûreté et de radioprotection.

Site Orano de La Hague

En 2024, l’ASNR juge globalement satisfaisantes les performances du site de La Hague en matière de sûreté nucléaire, de radioprotection et de protection de l’environnement. 

L’ASN souligne la bonne maîtrise des opérations de conduite et le suivi des compétences, tout en appelant à une meilleure sérénité dans la salle de conduite et un suivi plus rigoureux des contrôles périodiques. Si le déploiement d’une nouvelle organisation de maintenance est apprécié, des efforts restent attendus sur la gestion de l’obsolescence des pièces critiques et la surveillance des sous-traitants. En ce qui concerne la gestion du risque incendie, l’ASN relève la bonne réactivité du personnel lors des exercices, mais des améliorations sont requises sur la gestion des inhibitions, la maintenance et la conformité réglementaire des équipements. 

En radioprotection, malgré le bon fonctionnement du pôle de compétence, plusieurs écarts et dysfonctionnements sont relevés, notamment sur le suivi des appareils et la gestion des sources. L’ASNR attend une accélération des plans d’action engagés sur ces points.

Sur le plan environnemental, les exigences réglementaires sont globalement respectées, mais des lacunes persistent dans la maîtrise des risques non radiologiques, illustrées par une fuite d’acide nitrique et des écarts liés à la gestion des fluides frigorigènes. L’ASNR enjoint Orano à renforcer ses dispositifs de prévention. 

Par ailleurs, les projets d’infrastructures comme les nouvelles unités NCPF et les nouveaux itinéraires de transport interne ont été correctement mis en œuvre, malgré quelques retards dans l’amélioration du système EMEM.

Enfin, en ce qui concerne les projets de démantèlement et de reprise de déchets anciens si les travaux sont réalisés dans de bonnes conditions de sûreté, de nombreux retards affectent les calendriers : des aléas techniques freinent la reprise des déchets du silo 130, le projet HAO accuse deux ans de retard, et des incertitudes pèsent encore sur les silos 115 et sur les évaporateurs de l’atelier HAPF. L’ASNR appelle à une amélioration de la fiabilité des équipements et de la capacité d’anticipation d’Orano, tout en saluant les mesures de coordination entre chantiers de démantèlement et installations en exploitation.

Domaine médical

En 2024, la radioprotection dans le domaine médical reste globalement satisfaisante, bien que plusieurs signaux faibles appellent à la vigilance. Des tensions sur les effectifs (MERM, physiciens médicaux, médecins), une externalisation mal encadrée de certaines missions (notamment en imagerie), ainsi qu’une progression rapide de la téléradiologie contribuent à une complexification des organisations de soins et à une dilution des responsabilités.

En radiothérapie, les fondamentaux de sécurité sont en place mais le retour d’expérience s’essouffle. 

En curiethérapie, la radioprotection reste maîtrisée, bien que la sécurisation des sources de haute activité et le maintien des compétences nécessitent une vigilance accrue.

En médecine nucléaire, si les pratiques sont globalement conformes, des améliorations sont attendues sur la gestion des déchets, la sécurisation des processus d’administration des médicaments, ainsi que la formation continue.

Des non-conformités persistent dans les pratiques interventionnelles radioguidées, notamment sur la formation à la radioprotection et la coordination avec les prestataires. En scanographie, des lacunes dans la mise en œuvre du principe d’optimisation et dans l’habilitation des personnels ont motivé le lancement d’une campagne d’inspections en 2025.

Domaines industriel, vétérinaire et en recherche des rayonnements ionisants

Dans ces secteurs très hétérogènes, la radioprotection reste globalement maîtrisée, mais l’ASNR relève des écarts persistants entre établissements.

En radiographie industrielle, si les obligations de base sont généralement respectées, des failles demeurent dans la signalisation des chantiers, la mise en œuvre des vérifications réglementaires et la coordination entre donneurs d’ordre et entreprises. L’ASNR recommande à nouveau de privilégier les opérations en casemate. En 2024, un tiers des inspections a révélé une mauvaise utilisation du radiamètre.

Dans les laboratoires de recherche, les fragilités portent principalement sur la gestion des déchets radioactifs et la reprise des sources historiques, souvent freiné par un manque d’anticipation budgétaire. Deux événements significatifs liés aux accélérateurs ont été correctement gérés, mais rappellent la nécessité d’une vigilance renforcée.

Dans le secteur vétérinaire, la réglementation est globalement bien appliquée pour la radiologie des animaux de compagnie. Des lacunes subsistent toutefois lors des actes réalisés hors établissements ou sur grands animaux, et certaines structures en forte non-conformité ont nécessité des mesures coercitives.


La division de Caen de l’ASNR assure la mise en œuvre des missions de contrôle sur le terrain pour toutes les installations et activités nucléaires de leur territoire. Elle instruit les demandes d’autorisation, vérifie la conformité à la réglementation relative à la sûreté nucléaire, à la radioprotection, à la gestion des équipements sous pression ainsi qu’aux installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE). Elle assure également l’inspection du travail dans les centrales nucléaires.

En cas d’urgence radiologique, elle assiste les préfets dans la protection des populations et participent à la préparation des plans d'urgence. Elle est aussi active dans l’information du public, notamment via les CLI, et entretient des liens avec les médias, élus, associations, exploitants et autorités locales.